Préface
Ce document constitue la troisième édition de CSA N288.2, Lignes directrices pour le calcul des conséquences radiologiques pour le public d’un rejet aérien de matières radioactives associé aux accidents de réacteurs nucléaires. Il remplace les éditions précédentes publiées en 2014 et en 1991 en anglais seulement et qui s’intitulait Guidelines for calculating radiation doses to the public from a release of airborne radioactive material under hypothetical accident conditions in nuclear reactors.
Cette norme fait partie d’une série de normes sur la gestion de l’environnement applicables aux installations nucléaires. Elle décrit les méthodes acceptables pour la modélisation des conséquences des accidents qui se produisent aux réacteurs nucléaires pour l’évaluation de la sûreté et des interventions en temps réel en cas d’urgence. Cette norme détermine les sources de données acceptables de même que les méthodologies acceptables pour tenir compte des effets spécifiques, et recommande les paramètres ultimes normalisés pour les calculs.
Cette édition a été mise à jour pour tenir compte des pratiques en vigueur dans l’industrie et des nouvelles méthodes de recherche et d’analyse. Les principales modifications apportées à cette édition sont :
a) Les définitions ont été mises à jour pour être cohérentes avec la série de normes CSA N288.
b) Les clauses administratives (p. ex., le terme « catégorie I ») ont été supprimées.
c) Des clarifications supplémentaires ont été ajoutées dans les domaines signalés par les utilisateurs.
d) Les définitions des accidents hors dimensionnement et des accidents graves ont été adaptées à celles fournies dans CSA N290.16.16.
Il est rappelé aux utilisateurs de cette norme que le choix du site, la conception, la fabrication, la construction, l’installation, la mise en service, l’exploitation et le déclassement des installations nucléaires au Canada sont régis par la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires et à ses règlements. La Commission canadienne de sûreté nucléaire pourrait imposer des exigences supplémentaires à celles énoncées dans cette norme.
Les normes CSA de la série N fournissent un ensemble interrelié d’exigences relatives à la gestion des installations et des activités nucléaires. CSA N286 énonce les directives générales de gestion pour élaborer et mettre en oeuvre de saines pratiques de gestion et mesures de contrôle; les autres normes CSA du secteur nucléaire stipulent les exigences techniques et les lignes directrices relatives au système de gestion. Cette norme est utilisée de concert avec CSA N286. Elle ne reproduit pas les exigences générales de CSA N286, mais peut fournir des directives plus précises relatives à ces exigences.
Groupe CSA tient à remercier Hamlat Said qui a bien voulu effectuer la vérification de l'exactitude technique de la version française de cette norme.
Domaine d’application
1.1 Types d’évaluation des conséquences
Cette norme propose des méthodes pour la modélisation des conséquences des accidents liés aux réacteurs nucléaires pour l’évaluation de la sûreté et les interventions en temps réel en cas d’urgence.
Notes :
1) Les modèles utilisés pour évaluer les conséquences d’un accident postulé aux fins d’évaluation de la sûreté sont très semblables à ceux utilisés pour les conséquences d’un accident nucléaire en temps réel aux fins d’intervention en cas d’urgence, y compris le calcul de la dispersion et des concentrations atmosphériques. Toutefois, les deux types de modèles ne traitent pas les termes sources et les paramètres ultimes de la même manière.
2) L’évaluation de la sûreté est une activité prospective qui comprend :
a) les calculs déterministes et probabilistes effectués aux fins de satisfaire aux exigences de l’autorité compétente (AC);
b) l’évaluation probabiliste du risque dans le cadre d’analyses coûts-bénéfices; et
c) les calculs déterministes et probabilistes effectués aux fins de la planification des mesures d’urgence.
3) L’évaluation des conséquences de l’intervention en cas d’urgence est effectuée pendant une urgence réelle pour confirmer la protection du public et de l’environnement. L’évaluation des conséquences de l’intervention en cas d’urgence est effectuée pour les accidents postulés pour appuyer les activités de préparation comme l’implantation de centres d’accueil des évacués et la formation des intervenants d’urgence.
4) Tous les états d’accidents nucléaires d’une centrale sont couverts par le champ d’application de cette norme (voir REGDOC-2.5.2).
1.2 Installations
Cette norme a pour objet de renseigner sur la façon de modéliser les conséquences radiologiques des rejets accidentels dans l’atmosphère provenant d’un réacteur nucléaire.
Lorsque cette norme est utilisée pour des installations autres que des réacteurs nucléaires, l’utilisateur est invité à faire preuve de prudence, car il est responsable de déterminer si la norme est pertinente à sa situation.
Note : La gamme des distances indiquées à l’article 1.5 pourrait ne pas convenir aux petits réacteurs nucléaires et par conséquent, il incombe à l’utilisateur de déterminer les modèles qui seraient pertinents à moins de 300 m.
1.3 Conditions de fonctionnement
Cette norme s’applique lorsque des matières nucléaires sont rejetées dans l’atmosphère par suite d’un accident de réacteur nucléaire, sous réserve des exclusions de l’article 1.10.
Des parties de cette norme peuvent s’appliquer à l’évaluation des conséquences des émissions dans l’atmosphère découlant des incidents de fonctionnement prévus (IFP). Dans ces cas, il incombe à l’utilisateur de déterminer la pertinence de cette norme.
1.4 Échelle de temps
Cette norme s’applique aux rejets accidentels de courte durée (moins d’un mois) d’un réacteur nucléaire.
Note : Les méthodes permettant d’estimer les doses lors de périodes de rejets d’une durée supérieure à 30 jours sont au-delà du domaine d’application de cette norme, mais relèvent d’autres documents, comme CSA N288.1.
1.5 Échelle spatiale
Cette norme concerne la dispersion atmosphérique locale, qui pour les modèles gaussiens des panaches est définie comme la dispersion se produisant entre 300 m et 100 km.
Notes :
1) La limite inférieure a été établie à 300 m parce que des modèles spécialisés sont nécessaires pour des distances inférieures et que personne ne vit aussi près d’une centrale. En outre, les prévisions des modèles de dispersion locale présentées dans cette norme sont relativement fiables jusqu’à une distance de 20 km. Les incertitudes augmentent à mesure que la distance augmente et les modèles de dispersion locale ne sont plus fiables pour les calculs de dose individuelle au-delà de 50 km (voir l’article 7.2.6). Pour les calculs de dose individuelle au-delà de 50 km, voir l’article 4.6.4.
2) Les interventions en cas d’urgence pourraient nécessiter d’élargir la gamme de validité à 50 km malgré la perte de précision. La précision du modèle gaussien limite son application au calcul d’une dose individuelle pour des distances inférieures à 50 km. Bien que la confiance dans les prévisions du modèle diminue avec l’augmentation de la distance, l’utilisation d’un modèle de panache gaussien est justifiée si les données météorologiques détaillées exigées pour conduire des modèles sophistiqués de dispersion de l’air ne sont pas disponibles. De plus, l’utilisation de modèles gaussiens est acceptable pour calculer la dose collective, car sur de telles quantités agrégées, les erreurs ont tendance à s’annuler. La pertinence du modèle jusqu’à 100 km permet de calculer les doses collectives englobant les principaux centres urbains à proximité. Au-delà de 100 km, les doses ne contribuent que faiblement à la dose collective (voir l’article 7.14.2).
3) L’utilisateur est responsable d’interpréter la dose individuelle en cas de rejet aérien d’une installation à plusieurs réacteurs.
4) Pour les distances supérieures à cette échelle, les modèles perfectionnés pourraient être utilisés tout en tenant compte des limites du modèle retenu.
1.6 Échantillonnage météorologique
Cette norme vise :
a) le scénario météorologique unique (calculs déterministes); et
b) l’échantillonnage probabiliste des registres des données météorologiques.
1.7 Voies
Les modèles de dispersion (transport et diffusion) et le devenir des contaminants radioactifs libérés dans l’atmosphère sont visés par cette norme. Cette norme traite également des voies d’immersion dans le panache en suspension dans l’air (irradiation provenant du panache), de l’exposition externe au sol contaminé (provenant du sol), et de l’inhalation. L’absorption par voie cutanée de la vapeur d’eau tritiée (HTO) est comprise dans la voie d’inhalation.
Note : Les voies d’ingestion pourraient ne pas être pertinentes pour l’échelle de temps couvertes dans cette norme.
1.8 Contaminants
Cette norme vise les contaminants radioactifs en suspension dans l’air qui pourraient être rejetés accidentellement par les réacteurs nucléaires sous la forme de gaz, de particules et de vapeur d’eau.
1.9 Récepteurs et paramètres ultimes
Cette norme vise les récepteurs (voir l’article 7.2) et les paramètres ultimes (voir l’article 7.4) qui pourraient être touchés par les contaminants radioactifs rejetés par une installation nucléaire. Le calcul des quantités qui suivent fait partie de cette norme :
a) la concentration de contaminants dans l’air et dans le sol; et
b) les doses reçues et leurs effets sur la santé des personnes représentatives (y compris les travailleurs et la population se trouvant à plus de 300 m du rejet).
1.10 Exclusions
1.10.1 Rejets réguliers en exploitation normale
Cette norme ne traite pas des émissions qui se produisent dans le cadre normal de l’exploitation d’une installation nucléaire; ces émissions font l’objet d’une autre norme, soit CSA N288.1. Les modèles et les hypothèses diffèrent lorsqu’un rejet s’étend sur de nombreuses années, qu’il est de magnitude relativement faible, et que des humains demeurent à proximité de la source et vaquent à leurs activités normales.
1.10.2 Déversement et rejets liquides
Cette norme ne traite pas des déversements ni des rejets accidentels de contaminants radioactifs dans l’eau de surface ou souterraine. Toutefois, les émissions aériennes générées par un tel déversement sont considérées, puisque l’épuisement des rejets radioactifs par déposition dans l’eau est traité dans cette norme, lorsqu’il y a un plan d’eau entre la source et le récepteur. Par contre, le transport des eaux de surface est exclu.
1.10.3 Dispersion en milieu urbain
La plupart des effets de la dispersion en milieu urbain (canyon urbain, réchauffement différentiel des murs, etc.) sont au-delà du domaine d’application de cette norme. Une dilution plus importante attribuable à la rugosité des grandes surfaces des milieux urbains peut être prise en compte dans le calcul des paramètres de dispersion verticale (p. ex., voir l’article B.1.12).
1.10.4 Incendies et explosions
Cette norme ne traite pas des rejets de matières radioactives coïncidents avec et attribuables à des incendies ou des explosions. Cette norme ne traite pas des applications spéciales comme les actes malveillants.
1.10.5 Ouragans et tornades
Les conditions météorologiques violentes comme les ouragans et les tornades ne sont pas visées par cette norme. Ces conditions sont exclues parce qu’elles sont associées à des vents forts et à des champs de vent complexes qui entraînent une dispersion accrue et des concentrations plus faibles que par conditions météorologiques normales.
1.10.6 Dispersions régionales et globales
Les dispersions régionales (méso-échelle) et globales sont exclues car il faut s’attendre à ce que les conséquences soient négligeables au-delà de 100 km. Cette norme met l’accent sur la dispersion locale (distances inférieures à 100 km).
1.10.7 Contaminants chimiques
Cette norme ne traite pas des contaminants non radioactifs ni de la toxicité attribuable aux radionucléides. Cette norme ne traite par conséquent pas des concentrations extrêmes comme paramètres ultimes ni de la chimie atmosphérique.
Note : Les substances toxiques, corrosives ou nuisibles pour l’environnement sont des exemples de contaminants non radioactifs.
1.10.8 Voies d’ingestion
Les voies d’ingestion ne sont pas visées par cette norme.
1.10.9 Coûts incluant celui des interventions hors site
Cette norme ne traite pas des conséquences économiques, comme le coût de l’évacuation, du remplacement de la nourriture et de la remise en état éventuelle, associées à un accident nucléaire se produisant dans un réacteur nucléaire. La simulation des mesures de protection comme l’évacuation et la mise à l’abri de la population en cas d’urgence n’est pas visée par cette norme, mais le facteur de réduction de dose associé à l’occupation après un accident pourrait être pris en compte.
1.10.10 Logistique des mesures de protection
Bien que cette norme traite du calcul des doses pour la planification des mesures d’urgence, elle ne vise pas l’évaluation de la logistique des mesures de protection du public.
1.10.11 Biote non humain
Les doses et leurs effets sur le biote non humain ne sont pas visés par cette norme.
Note : Voir CSA N288.6 pour la dose et les effets sur le biote non humain pendant l’exploitation normale.
1.11 Terminologie
Dans cette norme, le terme « doit » indique une exigence, c’est-à-dire une prescription que l’utilisateur doit respecter pour assurer la conformité à la norme; « devrait » indique une recommandation ou ce qu’il est conseillé mais non obligatoire de faire; et « peut » indique une possibilité ou ce qu’il est permis de faire.
Les notes qui accompagnent les articles ne comprennent pas de prescriptions ni de recommandations. Elles servent à séparer du texte les explications ou les renseignements qui ne font pas proprement partie de la norme.
Les notes au bas des figures et des tableaux font partie de ceux-ci et peuvent être rédigées comme des prescriptions.
Les annexes sont qualifiées de normatives (obligatoires) ou d’informatives (facultatives) pour en préciser l’application.